Histoire

"Jadis, simple guinguette aux tonnelles fleuries, la Closerie des Lilas est devenue le rendez-vous de la création cosmopolite."

Fin XIX ème, relais de poste sur la route de Fontainebleau, la Closerie est le premier de tous les cafés qui firent la réputation du quartier de Montparnasse. Sa gloire et son nom lui vinrent de sa promiscuité avec le bal Bullier, qui était alors le plus célèbre bal de Paris. Dressé au milieu d'un jardin de lilas, le Tout Paris se presse pour danser le quadrille dans ce décor digne des Mille et une Nuits. La bourgeoisie s'encanaille auprès d'artistes désargentés, de danseuses affriolantes et d'anonymes émerveillés. La Closerie devient le lieu de ralliement d'avant ou d'après bal, Emile Zola y entraîne son ami Paul Cézanne, Théophile Gautier et les frères Goncourt sont des fidèles. Le ton est donné.

Au début du siècle, Paul Fort pousse la porte de la Closerie des Lilas et s'y installe. On le voit en terrasse jouer aux échecs avec Lénine. Paul Fort est un prince, le prince des poètes, il succède ainsi à un autre habitué du lieu, Paul Verlaine. Chaque mardi dans la grande salle du rez de chaussée il réunit ses amis, hommes de lettres. Ensemble ils confrontent leurs opinions, échangent des poèmes, déclament des vers à l'assemblée. Apollinaire les rejoint et leur présente Alfred Jarry, créateur de la pataphysique. On se souvient encore de ce jour où Jarry s'assit près d'une ravissante femme au regard un peu froid et las d'être ignoré, dégaine et tire dans le miroir lui faisant face : "Mademoiselle, maintenant que la glace est rompue, causons!".
Ces réunions dépassent trés vite le simple cadre de Montparnasse, les peintres du Bateau-Lavoir se mêlent admirablement aux jeux des mots des poètes de la Closerie. Les mardis de la Closerie deviennent le rendez-vous international de la pensée.

Entre-temps, Paul Fort, Moréas et Salmon créent la revue littéraire : Vers et Prose, un monument des lettres françaises. Vers et Prose reçoit d'illustres signatures :  Maeterlinck, Stuart Merrill, Barrès, Gide, Maurras, Jules Renard, Apollinaire.

En 1922, à la Closerie des Lilas, une dispute entre Tristan Tzara et André Breton marque la fin du mouvement dada à Paris.

 Si la Closerie est la scène où se joue le destin de dadaïsme, elle devient bientôt celle où éclate de manière spectaculaire le scandale du surréalisme. En Amérique, il y a la prohibition. En Europe, on peut boire en paix et la vie n'y est pas si chère, la Closerie devient un des hauts lieux de la colonie américaine. Hemingway, Fitzgerald, Miller... " Il n'était pas de bon café plus proche de chez nous que la Closerie des Lilas, et c'était l'un des meilleurs cafés de Paris. Il y faisait chaud, l'hiver ; au printemps et en automne, la terrasse était très agréable..." (Hemingway)

Venus du monde entier, chantres du classicisme, fervents du surréalisme, prince du cubisme, ont donné à la Closerie ses lettres de noblesse. La Closerie des Lilas devient le théâtre des pensées les plus vives de son époque.

Au long d'un siècle et demi, tous les plus grands poètes, tous les plus beaux esprits, tous les talents des arts, y reconstruisent le monde à la mesure de leur démesure. Modigliani, Paul Fort, André Breton, Aragon, Van Dongen, Picasso, Jean-Paul Sartre, André Gide, Paul Eluard, Oscar Wilde, Beckett, Man Ray, Ezra Pound et tant d'autres...

Les années passent, les générations se succèdent, la tradition des Arts perdure à la Closerie.